S’exiler pour son stage du Barreau

Par Audrey MacKay (Genève, Suisse)

En juillet 2016, j’ai terminé mon stage du Barreau du Québec au Comité international de la Croix-Rouge (CICR), à Genève. Sous la supervision d’une avocate membre du Barreau du Québec, j’ai travaillé pendant six mois dans l’unité des Services consultatifs en droit international humanitaire (DIH). Puisque j’ai toujours voulu faire carrière en droit international humanitaire ou en droits humains, je n’ai pas hésité avant d’accepter le stage. Mon entourage, par contre, comprenait moins bien ce qui me portait à m’exiler après avoir passé au travers de quatre mois d’étude intense en droit québécois. Dans les semaines précédant mon départ, on m’a posé toutes sortes de questions. Certaines d’entre elles étaient évidentes pour moi, d’autres m’ont plutôt amené à réfléchir. Six mois après la fin de mon stage à l’étranger, voici comment je répondrais aujourd’hui à quelques-unes de ces questions.

Qu’est-ce que tu vas faire là-bas? Pendant mon stage, je travaillais dans une unité qui assiste les États dans la mise en œuvre nationale de leurs obligations en droit international humanitaire. Entre autres, l’équipe rédige des lois-modèles et des guides législatifs, tient une base de données sur les législations et jurisprudence nationales en DIH et prépare des cours et des conférences pour les parlementaires et les juges. Toutes ces tâches sont menées en collaboration avec un réseau de juristes déployés sur tous les continents. En tant que stagiaire, j’ai notamment fait des résumés de jurisprudence et de lois, participé à l’élaboration d’un guide de DIH à l’intention des parlementaires et j’ai mené des recherches sur la mise en œuvre nationale de certaines obligations spécifiques pour alimenter les réflexions institutionnelles.

Vas-tu aller en cour, plaider? Non. D’ailleurs, aucun des avocats avec qui j’ai travaillé au quotidien n’a à aller en cour. Notre travail se fait en amont, par le biais de conseils de nature juridique et via la dissémination du droit. Je n’ai pas passé mes six mois de stage devant un écran, par contre. J’ai régulièrement été amenée à me déplacer pour assister à des conférences de haut niveau et participer à des réunions avec des interlocuteurs externes.

Vas-tu faire du droit québécois? Je n’ai pas vraiment fait de droit québécois. J’ai eu à résumer quelques lois et décisions canadiennes, mais sans plus. J’ai aussi eu à lire des décisions de tribunaux de plusieurs pays et de juridictions internationales. Je me souviens avoir lu des lois hongroises, mexicaines, chinoises, maliennes etc. Par chance, on avait accès à un bon réseau de traducteurs!

Est-ce que ton Barreau va t’être utile? Je mentirais si je disais que j’ai utilisé les notions que j’ai apprises à l’École du Barreau pendant mon stage. Malheureusement, il n’y a aucun cours de droit international dans la formation professionnelle. Par contre, sans le stage du Barreau et le mentorat de ma maître de stage, je n’aurais probablement jamais réussi à entrer au CICR, une institution renommée qui se permet d’être très sélective à l’embauche. Il faut aussi dire que j’ai découvert au cours de mon stage à l’étranger qu’être membre d’un Barreau, peu importe lequel, est reconnu comme un gage de persévérance et de ténacité.

As-tu les qualifications requises pour travailler en DIH? Effectivement, c’est une question pertinente à se poser après avoir fait quatre mois intensifs au Barreau. Malgré mes cours à l’université, les Conventions de Genève commençaient à être loin dans ma mémoire après les hypothèques, le partage de pension et les procédures criminelles. J’ai dû me mettre à jour en DIH, étudier et relire les textes de droit international au début de mon stage. Avec une bonne curiosité intellectuelle et une volonté d’apprendre, ça n’a pas posé de problème.

Qu’est-ce tu vas faire après ton stage? C’est LA grande question. J’avais prévu rentrer au Québec et me trouver un emploi en défense criminelle, mais je me suis fait offrir un poste à la fin de mon stage. Après une brève prolongation de mon contrat aux Services consultatifs, j’ai été engagée pour un contrat d’un an dans un autre unité, en droit et politique humanitaire.

Qu’en est-il de ta carrière en droit québécois? Pour l’instant, mon stage de Barreau m’a servi de tremplin pour une carrière en droit international, et je compte profiter des opportunités que se présentent. Je ne rejette pas l’idée de rentrer pratiquer en droit québécois dans quelques années, et je suis consciente du fait que ma réintégration au milieu juridique québécois comportera quelques embûches – et probablement une petite mise à jour théorique! Mais je sais que mon expérience à l’international m’aura outillée d’une manière inestimable et j’ai confiance que cette expérience sera reconnue comme telle sur le marché du travail québécois.

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